Podcast épisode 10

Transcript de la conclusion de l’épisode

Tristan On a commencé gravement en rappelant - ce qui est quand même le sujet du podcast - est-ce qu’il faut renoncer à certains aspects du numérique d’ici 2030 ? Et tu nous as parlé de cette idée, de ce post de dégoogliser internet emprunté à framasoft. Et déjà, je remarque que, ce qui est peut-être un apprentissage pour moi qui ai quitté twitter assez récemment, c’est que quand on s’exprime sur les réseaux sociaux, on se fait attaquer des deux côtés : y en a qui disent que t’as raison, d’autres disent que tu as tort, bref, tu as toujours tort, et c’est bien pour ça que j’ai fermé mon compte, et que je l’ai fait avec un certain soulagement.

Alexis Et toujours raison au passage !

(Rires)

Tristan Peut-être. Je note qu’on peut être en entreprise et dire des choses sympa. Ma foi, je le souhaite, parce que j’ai presque toujours été en entreprise, mais aussi en association, et j’espère que je suis un mec plutôt sympa et que je note que tu étais réformiste mais pas révolutionnaire, justement là où on t’accusait un peu trop d’être partisan.

On peut dire des vérités courageuses, oui, en entreprise, ou du moins on peut le faire chez OCTO, mais il faut le faire avec de la rigueur dans le raisonnement, et c’était ce qui t’était reproché. Ensuite, on a abordé un sujet fondamental, c’est : est-ce que les entreprises peuvent servir l’intérêt général ? Et alors là, pour le coup, c’est éminemment politique, en fait, ça dépend si t’es de droite ou de gauche.

(Rires)

Parce que, si t’écoute, et on le voit, avec toutes ces start-up qui se créent et qui pensent utiliser du capital-risque pour faire prendre le virage écologique au système, je ne suis pas totalement convaincu. Une partie de moi se dit : ah oui, ça serait bien que ça marche. Et une partie de moi se dit : mais en fait, on rempile sur le productivisme, sur l’accélération, sur l’extractivisme et finalement, on aura résolu aucun problème. On aura juste enrichi quelques personnes supplémentaires. Et comme en plus, ce sont des investisseurs, c’étaient des gens qui étaient déjà riches, et qui le seront encore un petit peu plus.

(Rires)

Et c’est bien ça le problème. Il faut rémunérer les actionnaires, et ça se fait bien trop souvent aux dépens des travailleurs. Alors évidemment, dans le monde associatif, le problème se pose moins, encore que je connais des associations qui maltraitent particulièrement avec zèle leurs propres collaborateurs, c’est une certitude. Et je ne parle pas de mozilla…

(Rires)

…pour laquelle je travaillais. En association on n’a pas de capital et finalement, c’est libératoire et, à la place, on peut peut-être avoir des partenariats fructueux, à condition qu’il ne nous fasse pas renoncer à ce que on est vraiment.

Ensuite, on a fait une belle boucle sur le besoin de réconciliation - merci Bela - et aussi sur ce sentiment d’urgence, sentiment que je partage profondément. Pourquoi ? Parce que la science nous dit qu’on n’a plus le temps et que je pense que beaucoup de gens, et la plupart d’entre nous dans une certaine mesure, a besoin de confort. On en a marre de cet inconfort, de cet appel au changement permanent, qui est difficile, et on aimerait tous, plus ou moins, avoir un peu de business as usual, histoire de est-ce qu’on pourrait pas lever un peu le pied dans le changement qu’on a. Mais la vérité, c’est qu’on n’a pas le temps.

Et pourtant, il va falloir embarquer tout le monde. Comme l’explique brillamment Meriem, tout le monde n’avance pas à la même vitesse. Il faut accompagner, il faut célébrer les gens qui commencent à se mettre en route. Et pourtant, on a pas le temps. Elle souligne justement que l’open source est un bel exemple de collaboration - avec pourtant des gens qui sont vraiment dans l’entreprise.

Et enfin, on arrive sur le sujet de la décarbonation, avec lequel j’ai un accord et un désaccord simultané avec Bela. Moi, je viens historiquement de la décarbonation, c’est-à-dire que pour moi, ça a été le premier levier que j’ai découvert dans la problématique des limites planétaires, donc, l’effet de serre. Et donc, il faut décarboner, il faut réduire les gaz à effet de serre. Et pour moi, en tant qu’ingénieur, j’y ai vu un problème et je me suis dis : ça y est, on peut, c’est là qu’il faut attaquer des choses. En fait, c’est un peu l’arbre qui cache la forêt. La décarbonation, c’est l’arbre qui cache la forêt des limites planétaires. Et c’est là que je suis d’accord avec Bela. Il ne faut pas regarder juste le premier arbre sous prétexte qu’il est mieux documenté ou plus visible que les autres. C’est vrai que les travaux du GIEC sont très importants dans ce sens-là et c’est les travaux les plus avancés, mais derrière, il y a d’autres limites planétaires. On parle un peu plus maintenant de la biodiversité, mais il ne faut pas se laisser enfermer dans la vision tunnel du carbone. Et là, avec Bela, je suis complètement d’accord. Là où je suis pas d’accord, c’est que on va pas pouvoir régler le problème de décarbonation et continuer le business as usual, à mon sens. Je pense que le problème, il est trop gros, mais ce n’est pas grave si Bela et moi ne sommes pas complètement d’accord.

Et enfin, on arrive sur la raison d’être. Pour moi, la raison d’être, elle, est essentielle aujourd’hui, où les gens commencent à toucher du doigt le fait qu’ils ont besoin de sens dans leur travail, ça en fait quelque chose d’essentiel. Mais la question mérite d’être posée : est-ce qu’avoir une raison d’être c’est pas une façon de faire du business as usual et de continuer à pousser l’extractivisme et le productivisme ? Je vous laisse réfléchir à cette éventuelle conséquence et merci infiniment à toutes les deux pour votre participation. C’était passionnant.

Alexis Merci encore, salut !

Tristan salut !

Bela Merci beaucoup,

Meriem merci, salut.